dimanche 18 février 2024

Deuxième campagne de fouilles sur l'atelier de métallurgie du Haut Empire des Condamines à Cabrières

 La seconde campagne de fouilles s'est achevée en décembre 2023. En 2022 nous avons entrepris une première campagne de sondages sur le site des Condamines. Nous avons dégagé deux fosses qui contenaient des rejets de minéralurgie et de métallurgie. 

Fosse en cours de fouille

Vue de deux fosses de rejets de métallurgie

Ces fosses ont livré des restes de foyers ainsi que de nombreuses scories. Ce type de fosses a pu être comparé avec une fosse de même type que nous avons fouillé sur le site de la Tude à 1 km à l'ouest. Les scories qui ont été étudiées par Emmanuel Dransart (Laboratoire EMTT) montrent une quantité importante de plomb. Ce qui semble démontrer un procédé métallurgique de coupellation afin d'extraire l'argent de la tétraédrite provenant des mines de la Roussignole.

En 2023 le Service régional de l'Archéologie a prescrit une fouille programmée. Durant cette campagne de fouilles nous avons pu dégager un fossé agraire qui est apparu à une profondeur de 0,60 m sous le niveau du sol actuel de la parcelle et à 2,50 m à l'ouest de la première des deux fosses fouillées en 2022. 


Début du décapage du fossé

Le fossé a été dégagé sur une douzaine de mètres de longueur. Sur une longueur de 2,50 m le comblement du fossé contenait un remplissage d'argile plastique, des pierres, des fragments de paroi de four mêlés à des fragments de tegulae recouverts de coulées scoriacées, ainsi que des charbons et des scories.

Vue du comblement argileux

L'autre partie du fossé contenait un remplissage issu du déversement de restes de foyers ainsi que des scories broyées. Ce sont 700 fragments de charbons de bois qui ont pu être étudiés par Julien Chardonneau-Henneuse qui a identifié la présence de 5 taxons dont du bois de hêtre(82%) associé à du sapin, du chêne à feuillage persistant, le filaire/nerprun alterne et l'arbousier. 

Vue du fossé


Six coupes ont été pratiquées dans le comblement du fossé afin d'étudier son comblement. Comme pour les fosses fouillées précédemment le comblement du fossé est essentiellement constitué par des rejets de foyers de métallurgie, des fragments de paroi de four et des résidus de fonderie (cuivre et argent)

Coupe 

Fragments d'un vase dans le comblement du fossé

Coupe

Vue en coupe d'un charbon au microscope

Plan du fossé

La fouille manuelle du fossé a permis d'observer l'homogénéité de son comblement. Le petit lot de céramiques et d'amphores associés nous situent dans un horizon augustéen tardif affirmé. L'absence totale de sigillée sud-gauloise est à remarquer et en accord avec le faciès général du mobilier (étude Stéphane Mauné). 



Analyse de scories (E.Dransart, laboratoire EMTT)


Coulée scoriacée sur tegula et fragment de paroi de four


         De nouvelles analyses de matériel métallurgique ont permis d’identifier à nouveau la présence de particules de galène et des gouttes métalliques avec éléments plomb. L’élément argent a été identifié dans les sulfures de cuivre et des gouttes de plomb. Les résultats de ces dernières analyses nous permettent de penser que l’atelier de métallurgie des Condamines en dehors d’une production de cuivre métal, a pu aussi effectuer des opérations de coupellation. D’autres analyses de résidus de métallurgie seront entreprises afin d’essayer de confirmer cette hypothèse. La présence de galène n’ayant pas été jusqu’à ce jour identifiée dans les analyses des minerais de Cabrières il conviendra d’effectuer de nouveaux prélèvements et analyses pour en rechercher la présence éventuelle. Le secteur de la Roussignole origine probable du minerai de cuivre traité sur l’atelier des Condamines sera en cela privilégié. En parallèle un travail d’inventaire des mines de plomb qui auraient pu alimenter en galène l’atelier métallurgique des Condamines (Lodévois, Monts d’Orb) sera entrepris.

 

         Il ressort de l’étude anthracologique la présence de cinq taxons parmi les 701 charbons identifiés dans le fossé :  le hêtre, le sapin, le chêne à feuillage persistant, le filaire nerprun alaterne et l’arbousier. On note une prédominance à 82% du bois de hêtre qui a servi à alimenter les fours et qui a pu être acheminé sur place sous la forme de charbon de bois.  

 

         L’étude du mobilier céramique qui a été découvert dans le comblement du fossé nous permet de confirmer que l’atelier de métallurgie des Condamines a fonctionné durant le principat d’Auguste et plus précisément au début du Ier s. ce qui offre une précision remarquable. Pour compléter cette étude, outre la question d’une production d’argent sur le site, qui pourrait ne correspondre qu’à un essai de coupellation, il manque l’essentiel, la fouille des fours métallurgiques. 

Leur présence est vraisemblablement très proche des structures qui ont été fouillées lors des campagnes 2022 et 2023. Des moyens seraient nécessaires pour effectuer un décapage de surface afin d’en déceler la présence et de pouvoir les fouiller. Nous aurions ainsi pour la première fois en Occitanie et même dans le Sud de la Gaule[1] une étude complète d’un atelier de métallurgie antique du cuivre, voire de l’argent.

 

 



[1] Nos recherches bibliographiques sont restées vaines sur le sujet.




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